vendredi 2 mars 2007

La technologie au service de l'homme



Le Prix mondial de l’alimentation 2004 est décerné à des scientifiques africains et chinois pour leurs travaux sur le riz
Le Prix mondial de l’alimentation 2004
Le World Food Prize (Prix mondial de l’alimentation) 2004 rend hommage aux protagonistes de la recherche rizicole sur deux continents . Reconnu de manière informelle comme le « Prix Nobel pour l’agriculture et l’alimentation », ce prix assorti d’une bourse de 250 000 $ vient récompenser les chercheurs Yuan Longping, de Chine, qui est directeur général du Centre national chinois de recherche et développement sur les hybrides et Monty Jones, du Sierra Leone, ancien chercheur principal sur le riz au Centre du riz pour l’Afrique (ADRAO).
Le Dr Jones a été choisi pour son travail révolutionnaire qui a mené à la création du NERICA (Nouveau riz pour l’Afrique), riz qui est aujourd’hui symbole d’espoir pour des millions de consommateurs et de producteurs de riz africains. Le riz NERICA est parfaitement adapté au faible apport d’intrants et aux conditions de croissance arides qui prévalent en Afrique subsaharienne.
La biotechnologie a été mise à profit pour trier des milliers de gènes et identifier les plants affichant les caractères souhaités qui ont servi au développement des NERICA. Ce riz résulte d’années de travail consacrées au croisement de variétés en vue de combiner la robustesse du riz africain aux rendements élevés des riz asiatiques. Or, il s’agit là d’une réalisation scientifique remarquable parce que les deux espèces de riz ont évolué séparément pendant des millénaires.
Nul ne saurait être plus heureux de la mise au point des NERICA et de la prestigieuse reconnaissance dont ils font l’objet que le Dr Kanayo Nwanze, le très respecté directeur général de l’ADRAO . « Nous sommes très fiers du Dr Monty Jones, le père des NERICA, qui vient d’être proclamé lauréat du Prix mondial de l’alimentation cette année », a-t-il déclaré. C’est sous le leadership du Dr Nwanze, au sein de l’ADRAO en Côte d’Ivoire, que Monty Jones et ses nombreux partenaires des quatre coins du globe ont développé les NERICA pour les rendre résistants aux contraintes locales.
Les premières variétés NERICA ont été mises à l’essai en plein champ au milieu des années 1990. Les NERICA sont maintenant cultivés ou mis à l’essai au Bénin, au Burkina Faso, en Côte d’Ivoire, en République du Congo, en Éthiopie, en Guinée, en Gambie, au Gabon, au Kenya, à Madagascar, au Malawi, au Mali, au Mozambique, au Niger, au Nigeria, au Sierra Leone, en Tanzanie, au Togo et en Ouganda.
En Guinée, grâce au succès des variétés NERICA, les riziculteurs parviennent maintenant à tirer un revenu brut de 65 $US à l’hectare avec un minimum d’intrants, et de 145 $US à l’hectare avec une quantité modérée d’intrants. Le pays a économisé plus de 13 millions de $US sur les importations de riz en 2003. On observe aussi un engouement croissant pour les NERICA en Ouganda, où ils ont été introduits il y a tout juste trois ans.
Au quotidien, ceci signifie que de nombreux agriculteurs peuvent non seulement nourrir convenablement leur famille, mais aussi envoyer leurs enfants à l’école grâce à la vente de leur excédent de riz sur les marchés locaux. Les femmes, qui s’occupent en grande partie du repiquage et du désherbage, apprécient le fait que le riz NERICA parvient à maturité en moins de 100 jours, comparativement à 120 à 140 jours pour les variétés locales. Les riziculteurs ont réalisé que chaque panicule de riz produit environ 400 grains, comparativement à 250 environ dans le cas des variétés traditionnelles. Au point de vue nutritionnel, les NERICA fournissent aussi plus de protéines, soit environ 10 à 12 pour cent comparativement à 8 à 10 pour cent pour les autres variétés.
À des milliers de kilomètres de là, en Asie, il y a trois décennies, le professeur Yuan mettait au point les outils génétiques essentiels à l’hybridation du riz. Il fut le premier à cultiver des variétés hybrides de riz dans les années 1970, avec des rendements supérieurs de 20 pour cent à ceux des variétés traditionnelles. Il rendit possible la culture à grande échelle du riz en Chine en altérant les propriétés d’autopollinisation du riz. La production qui découle aujourd’hui de ces travaux permet de nourrir 60 millions de personnes de plus chaque année.
« C’est une coïncidence heureuse que le Prix mondial de l’alimentation ait été attribué pour des réalisations dans le domaine de la recherche rizicole, car l’année 2004 a été déclarée par les Nations Unies, Année internationale du riz », a déclaré le Dr Nwanze. Le thème « Le riz, c’est la vie », rappelle au monde entier que cette culture vivrière nourrit plus de la moitié de la population mondiale. L’un des éléments clés de la campagne consiste à souligner que les terres et les ressources en eau exigées par la riziculture sont en déclin.
« Alors que la Révolution verte des années 1970 a considérablement atténué le fardeau de la faim dans certaines parties du monde, ces avantages plafonnent maintenant », déclarait le Dr Jacques Diouf, directeur général de Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO) . Cette tendance vient souligner l’importance scientifique de la biotechnologie et de ses contributions essentielles à l’identification de gènes de résistance à la sécheresse et à la mise au point de variétés plus productives.
Deux points importants ressortent des nombreux aspects et succès associés à la création des NERICA. Tout d’abord, la biotechnologie – usage de marqueurs génétiques pour identifier les gènes – a raccourci de plusieurs années le processus de sélection du riz NERICA. Bien que les NERICA ne soient pas en soit le produit de transferts génétiques, ils sont certainement un produit de la biotechnologie. Deuxièmement, le processus d’adoption des NERICA tient compte du besoin des agriculteurs africains de constater le succès des nouvelles variétés dans une parcelle d’essai avant de mettre en péril leur propre survie par l’essai d’une nouvelle technologie. Le Centre du riz pour l’Afrique a donc mis au point un processus sur trois ans pour permettre aux riziculteurs d’évaluer les variétés NERICA de première main et dans les conditions climatiques locales. Ce processus consistait à établir dans le village d’un agriculteur respecté un jardin de riz comportant plusieurs variétés de riz, y compris des NERICA. À la fin de la saison, on utilisait les grains issus de cette parcelle pour permettre aux riziculteurs de faire l’essai de cinq variétés sur leur propre terrain.
À la fin de la deuxième saison de culture, on demandait aux riziculteurs de sélectionner trois variétés seulement, et de payer pour les semences. Comme partout ailleurs dans le monde, au moment de la récolte, les agriculteurs comparaient leur expérience et partageaient leurs apprentissages relatifs aux pratiques agronomiques. À la troisième année, les caractéristiques supérieures du riz NERICA étaient appréciées et adoptées pour des raisons tant agronomiques qu’économiques. L’adoption rapide des NERICA peut également être attribuée au fait que l’ADRAO a établi un système qui encourage les riziculteurs à produire des semences NERICA.
Le Dr Kanayo Nwanze parlera de ces développements ainsi que de l’Initiative africaine pour le riz à l’occasion de la National Agricultural Biotechnology Council Conference (NABC 16) qui se tiendra à Guelph (Ontario) le 13 juin 2004 . Monty Jones et Yuan Longping recevront officiellement le Prix mondial de l’alimentation le 14 octobre 2004 à Des Moines (Iowa), aux États-Unis. La cérémonie se tiendra dans le cadre du World Food Prize International Symposium, dont le thème en 2004 est « From Asia to Africa: Rice, Biofortification and Enhanced Nutrition ».

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